Je vais, en toute modestie, vous parler d’une plante extraordinaire, réelle bienfaitrice pour régénérer la terre, les animaux et les hommes, l’ Je vous livre ce que j’ai glané sur elle et qui est très « pauvre » par rapport à tout ce qu’il y aurait à dire sur elle.

INTRODUCTION

En guise d’introduction, voici un petit conte amérindien :

Au début des temps, le grand Manitou, Créateur de toutes choses, s’appliquait à ordonner chaque élément.

Il avait commencé par donner la vie aux végétaux puis aux animaux, enfin aux humains.

Parmi les premiers, il y avait les grands arbres, qui protégeaient les plus petits, eux même protégeant les frêles végétaux qui recouvraient le sol d’un immense tapis vert.

De toutes ces plantes, il en était une dont il était particulièrement fier, une petite merveille aux mille pouvoirs, dont l’idéal était de soigner et le sol, et les plantes, et les animaux, et les êtres humains.

Pour que chacun puisse la reconnaître facilement, elle s’épanouissait dans une splendide parure dorée. Ses fleurs et ses fruits resplendissaient de mille éclats à la lumière du jour.

Au bout de quelques temps, le Créateur entend une longue lamentation venant de la terre et il s’empresse de venir voir. Il découvre alors sa plante fétiche, pleurant à chaudes larmes.

  • Qu’as-donc, petite fleur, toi qui as tout reçu de moi, qu’elle est la cause de ce tourment ?
  • J’ai tant de vertus, je soigne tant de maux que les animaux de la forêt et les humains m’arrachent sans ménagement, récoltent mes graines avant même que je puisse me reproduire, mutilent les plus belles pousses dès leur plus jeune âge. A ce train-là, je vais bientôt disparaître à tout jamais !

Le grand Manitou, ému, s’éloigna et promettant d’aider la petite plante. Mais le dilemme n’était pas facile à résoudre : comment faire en sorte qu’elle garde ses pouvoirs, si utiles pour le bien-être de tous, tout en étant respectée et protégée d’une razzia impitoyable.

Il ne lui fallut pas moins de trois jours pour résoudre ce problème. Au bout de ce temps, par un beau matin, la petite plante aux mille vertus, se réveilla, entièrement recouverte d’une robe d’un vert, on ne peut plus banal. Même ses fleurs eurent droit au même traitement ! Elle ne s’en offusqua pas et comprit bien vite qu’ainsi, elle passerait inaperçue.

Pour parfaire sa protection, le Créateur eut aussi l’idée de l’armer d’un manteau de dards urticants.

Les premières fois, humains et animaux ne comprirent pas ce qui se passait : chaque fois qu’ils touchaient la plante tant aimée, ils souffraient d’horribles brûlures. La plante dorée était devenue la plante qui brûle, l’ortie brûlante !

Ils la délaissèrent quelques temps mais ne pouvant se dispenser de ses bienfaits, ils apprirent à s’en servir malgré le désagrément de ses dards. Ayant compris la leçon, ils se mirent à respecter la plante et lui demandèrent pardon chaque fois qu’ils eurent besoin de ses services. Ils ne l’utilisèrent plus qu’avec beaucoup de discernement.

Depuis ce jour, l’ortie a pu se multiplier librement et coloniser toute notre planète.

Et, pour bien montrer aux hommes, qu’elle n’est pas rancunière, elle a choisi de les accompagner dans tous leurs nouveaux campements, assurant ainsi sa mission en toute sérénité.

PRESENTATION DE LA PLANTE

Elle fait partie de la famille des Urticacées, comprenant 50 genres et 700 espèces réparties à travers le monde. En France, nous en avons 6 (Urtica dioica, Urtica urens, Urtica menbranea, Urtica pilulifera, Urtica astrovirens, Urtica sicula. Toutes ces orties brûlantes peuvent être utilisées mais la Grande ortie (Urtica dioica) et la petite ortie (Urtica urens) sont les plus fréquemment rencontrées.

C’est une plante élancée à feuilles opposées par 2, à tige quandragulaire. Les fleurs sont petites, en grappe ou en boules de couleur verdâtre. Elles ont 4 sépales mais pas de pétales. Elles donnent naissance à des fruits secs : l’akène. La présence de nombreux poils urticants sur la face supérieure des feuilles et sur la tige les distinguent des fausses orties (les lamiers).

La grande ortie (la plus répandue dans le monde) est vivace. Elle atteint facilement 1,50 m. Elle se propage par de longs rhizomes, couleur jaune. Elle est dioïque, c’est-à-dire qu’il y a des pieds mâles et des pieds mâles. Ses fleurs sont en grappe ramifiées et les feuilles plus longues que larges.

La petite ortie (la plus féroce) atteint 70 cm. Elle est monoïque (fleurs mâles et femelles sur le même pied). Elle est annuelle et se multiplie par dispersion de ses semences (1200 graines/pied). Sa racine est pivotante.

Les orties poussent sur des terres humifères, environs des villages, dans les champs, dans les jardins bien fumés, dans les décombres, enfin partout où l’homme ou le bétail a séjourné, partout où il y a eu accumulation de matière organique. Elle fait partie des plantes nitrophiles avec les rumex, les chénopodes, les cirses, les bardanes, les mercuriales.

Elle ne vit jamais seule. Si les terres sont riches, elle s’installe en massifs compacts, réels petits éco-systèmes avec une myriade d’insectes, des consommateurs, des prédateurs, des prédatés.

Pour info, lors des voyages dans les zones tropicales, on peut rencontrer des espèces très dangereuses comme l’arbre de feu (Laportea gigas) ou une autre encore, Urtica Ferox.

LES UTILISATIONS

C’est une plante tout à fait polyvalente aux multiples usages, tant alimentaire pour l’homme et le bétail que médicinal qu’au jardin en tant que produit phytosanitaire mais pas que…

DIVERSES UTILISATIONS

La fibre d’ortie habillait déjà les hommes dans les temps reculés. En Haute Egypte, les archéologues ont mis en évidence que les bandelettes des momies étaient faites en fibre d’ortie (il s’agissait de la ramie, une ortie exotique encore utilisée de nos jours). Dans la région du Dolpo (NO du Népal), pousse l’ortie géante de l’Himalaya (Girardinadiversifolia) qui est encore utilisée, sous son nom local allo. Sa fibre est d’une résistance remarquable.

Du XV ème au XVII ème siècle, en Europe, existait une industrie textile de la fibre d’ortie (la nôtre) mais qui a été détrônée par le chanvre plus rentable. Le poète britannique Sir Thomas Campbell, mort en 1844 a écrit « j’ai mangé des orties, j’ai dormi dans des draps d’ortie, j’ai dîné sur une nappe d’orties et les fibres des vieilles orties sont aussi bonnes que le lin pour faire des étoffes »

La fibre d’ortie a encore été utilisée pendant la première et seconde guerre mondiale car sa fibre est solide, imputrescible pour des toiles de tente, des sacs à dos, des tenues de camouflage. En hollande et en Sibérie orientale, on fabriquait des cordages et des filets de pêche.

Elle a aussi été utilisée pour la fabrication de papier où elle était mélangée à des vieux chiffons. La Banque de France l’utilise d’ailleurs encore pour la fabrication de nos billets de banque.

Ses propriétés antiseptiques et fongicides en font aussi d’excellents filtres en étamine pour le fromage.

L’ortie servait aussi à teindre les tissus dans des tons jaune, jaune-vert, vert. Dans la région de Metz, la tradition était de teindre les œufs de Pâques avec des orties.

Elle donne un colorant alimentaire, toujours utilisé dans l’industrie agroalimentaire et pharmaceutique (E 140) pour les chewing-gums, dentifrice …

AU PLAN ALIMENTAIRE

Plante compagne, légume primitif, elle a été consommée depuis la nuit des temps comme l’attestent les graines retrouvées par les archéologues sur les sites préhistoriques.

Dans l’antiquité, les grecs et les romains l’appréciaient. Pline l’Ancien, Aristophane, Dioscoride la citent, la consomment et la recommandent.

Même notre bon roi LOUIS XIV consommait des soupes d’orties avec des coquelicots. A essayer !

Pour beaucoup, aujourd’hui, l’ortie rime avec purin d’ortie. Au mieux, c’est un légume tout à fait occasionnel dont on se souvient pour la cure de printemps avec le pissenlit. D’ailleurs pour être efficace la cure d’orties doit se faire pendant 15 j à 3 semaines avec au moins 1 repas par jour aux orties. Ailleurs, notamment au Népal, c’est un aliment à part entière. Elle est très appréciée dans les pays scandinaves.

PARTIES UTILISEES

Première précaution à respecter : à cueillir dans des endroits non pollués, loin des routes, des sites industriels ou de champs traités.

Deuxième précaution : jeunes pousses, feuilles tendres et sommités avant la floraison. Aristophane disait « avant l’arrivée des hirondelles », donc avril, mai. Pour rallonger la période d’utilisation, on peut couper les orties et on mange les repousses (attention cependant d’en laisser pour les insectes, leurs larves et leurs chrysalides). Il vaut mieux éviter les feuilles dures, donc matures car elles ont tendance à avoir mauvais goût et, trop riches en carbonate de calcium, elles peuvent irriter les reins et provoquer des oliguries (baisse du volume des urines).

Les jeunes feuilles peuvent être mangées crues en salade ou en cure de jus mais, pour ce qui est de notre région, cela n’est pas conseillé à cause des risques de contamination par occocoxinose.

Les feuilles se mangent cuites en légume, en soupe, en pesto, en en purée, version lacto-fermenté, en accompagnement de poissons, dans les omelettes. Les recettes ne manquent pas.

Pour ce qui est des boissons, on peut la boire en tisane, en limonade, version bière …..

Les graines fraîches sont utilisées telles quelle sur des salades, des plats. Graines et feuilles se sèchent et peuvent être réduites en poudre.

L’ortie se congèle aussi très bien pour un usage ultérieur.

POUR LA MANIPULER

Les poils urticants ou plutôt les dards sont de petites pointes en silices, très cassantes et remplies d’un cocktail chimique très complexe, riche en histamine, en formiate de sodium, en sérotonine, en acétylcholine.

On peut la cueillir à mains nues à condition de la prendre par en-dessous (poils urticants sur la face supérieure des feuilles et sur les tiges) mais les gants restent quand même conseillés.

Elle perd ses propriétés urticantes en séchant ou à la cuisson. Elle pique moins si elle est mouillée.

On peut aussi déposer les feuilles entre 2 torchons et passer un rouleau à pâtisserie, ce qui casse les dards. Après ce traitement, elles ne piquent plus.

En cas de piqûre, se servir de suc de plantain, de suc d’oseille, de mauve ou de menthe selon ce que vous avez sous la main.

Pour clore ce volet, on peut réellement affirmer que consommer de l’ortie renforce la santé.

AU PLAN MEDICINAL

Les propriétés médicinales ont été vantées depuis l’antiquité : Dioscoride, Ovide, Galien, Hildegarde de Bingen et tant d’autres. La plupart des propriétés ont été vérifiées et expliquées.

PROPRIETES

L’ortie est dépurative, elle régénère le sang ; elle est anti anémique

C’est un excellent fortifiant général, un reminéralisant

Elle stimule les fonctions digestives (lourdeur, crampes d’estomac)

Elle est diurétique et astringente

Elle est anti asthénique : lutte contre la fatigue et régularise le sommeil

Elle améliore la concentration intellectuelle

Agit sur l’anxiété et la dépression

Elle lutte contre les infections urinaires et les cystites

Elle est utile pour les problèmes de peau acnéique (zinc = anti inflammatoire), pour les ongles cassants, la chute de cheveux (vit B2, B5, acide folique, silice et zinc)

Elle est hémostatique

QUELQUES INDICATIONS

Le suc frais sur une mèche de coton contre les saignements de nez, en gargarisme contre les aphtes et les inflammations des gencives

En infusion, contre les rhumatismes, l’arthrite, la diarrhée ; en gargarisme avec l’infusion contre l’angine

En cure de printemps et en poudre en cas d’anémie et de décalcification

En décoction (feuilles et racines) contre la goutte

COMPOSITION

Très riche en chlorophylle (1,5 g/kg de feuilles)

Elle contient des caroténoïdes (anti oxydants), des vit (B2, B5, C, E, K), des oligo-éléments (cuivre, fer, soufre, manganèse, magnésium, silice et nickel), des acides organiques et aminés (a. glycolique et a. glycérique), des tanins.

Elle est riche en protéines végétales (5 à 9 % de son poids). 2 x plus que le soja !

CONCLUSION

Ne vous privez pas de ses vertus. Si vous devez l’arracher, ne la jetez pas mais trouvez lui une utilité.

En guise de mot de la fin, j’aimerai, à l’instar des membres de la Confrérie des Amis de l’ortie, dire :

Ortie !

« Toi qui a su piquer ma curiosité et me révéler tes vertus, je te jure fidélité et assistance en tout lieu et en toute heure »

Pour info :

La Confrérie de l’Ortie a été créée en 1989 à Juprelle en Belgique (près de Liège). Credo : Reconstituer le sol humus et le corps de l’homme. L’ortie a sa fête, le week-end suivant la Pentecôte. Leur blog : urticamania

En France, il existe une Confrérie des amis de l’ortie, créée en 1996 en Normandie, à La Haye-de-Routot

Bibliographie :

« Les secrets de l’ortie » de Bernard BERTRAND. Ed de Terran

« Les plantes des Vosges » de Christian et Elisabeth BUSSER. Ed de la Nuée Bleue

Photo :

Bouquet d’orties en fleurs et roses. « La bonne et la belle »

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