Vu de loin, quoi de plus banal qu’un pissenlit mais à y regarder de près, quoi de plus fantastique !
Si le nom Pissenlit, apparu au XVIème siècle et lié à ses propriétés diurétiques est le plus usité, on le nomme aussi ,selon les régions, l’or du pré, fleuron d’or, florin d’or, salade de chien, salade de taupe et bien d’autres encore.
Son nom botanique est Taraxacum dens leonis. Il fait partie de la famille des Astéracées, du genre des Chicoracées et on en compte 1200 de par le monde.
Bien que son aptitude à coloniser tous les milieux soit remarquable, c’est dans les prairies, les pelouses, les bordures de chemin qu’il pousse en abondance.
C’est une plante herbacée, vivace dont l’aspect peut varier selon la richesse du sol, selon la nature sèche ou humide du terrain. Sa rosette sera plus ou moins fournie, plus ou moins élevée ; ses feuilles (limbes) seront plus ou larges, plus ou moins découpées. Dans l’ensemble, on ne peut guère se tromper (voir croquis).
A partir du mois de mars, une marée de petits soleil envahit certaines prairies. Un régal pour nos yeux, un festin pour les insectes !
Il faut savoir que Dame Nature a été très inventive pour notre pissenlit car elle l’a doté de plusieurs modes de reproduction :
Ce fin stratège a encore quelques tours surprenants dans sa besace. Pour exemple, il ouvre « sa boutique à nectar » de 9 h à 18 h mais que pour 3 jours puis il referme ses sépales autour des fleurs fécondées pour former un cocon protecteur (le pseudo bouton). Bien à l’abri, le développement des petites graines est optimisé. A maturation complète, la tige se redresse et prend de la hauteur (+ 10 cm au moins) pour assurer un meilleur envol aux akènes.
Comment ne pas être admiratif devant ce petit prodige aérodynamique ? La graine est suspendue par une petite tige sous son parapluie de soies (pappus), lui servant d’hélice et de parachute. Sa dispersion par le souffle du vent et, accessoirement, par celui des enfants, lui permet de coloniser l’espace tout autour de lui.
Malgré son amertume, le pissenlit est apprécié depuis toujours. Sans doute parce que cette plante est autant alimentaire que médicinale. Ses propriétés digestives, dépuratives et diurétiques n’ont jamais été remises en question.
A la sortie de l’hiver, sa consommation constitue une cure de régénération :
Comme pour le cochon, tout est bon dans le pissenlit ! On consomme les jeunes feuilles en salade, les feuilles plus coriaces cuites, les boutons floraux, les fleurs et la…racine.
L’expression « manger les pissenlits par la racine » nous vient automatiquement à l’esprit tant elle utilisée pour parler des défunts. Pourtant la racine se mange bel et bien.
Les racines servaient à fabriquer un succédané de café et des Toniques amers aux vertus apéritives et digestives. On devait même en importer car la production française ne suffisait pas !
Traditionnellement, c’est la cueillette de pissenlit sauvage qui s’impose. Il fait partie des toutes premières plantes offertes généreusement par la nature ; pourquoi se priver de cette manne gratuite ? Sa récolte occasionne aussi de belles sorties en plein air et nos poumons nous disent merci.
Compte tenu de la pollution environnementale, je peux comprendre la réticence de certains pour ce qui est de cueillette. Tout n’est pas perdu car on peut les semer au potager ; il existe des cultivars créés par les semenciers comme Abondance (pissenlit amélioré à coeur plein) et Vert de Montmagny (hâtif et très compact). A défaut, on peut, bien sûr, récolter des semences soi-même sur un beau pied que l’on aura épargné à cet effet.
Pour obtenir, tôt en saison, de bons pissenlits blanchis, il suffit de récolter des racines à l’automne, de les installer dans une tranchée et de les butter.
Un forçage en cave est aussi possible : on procède comme pour les endives.
J’aimerai, ici, partager avec vous une phrase de Jean-Jacques Rousseau qui, parlant du pissenlit, disait :
« Il faut suivre les fleurs dès avant leur épanouissement jusqu’à la pleine maturité du fruit et c’est dans cette succession qu’on voit des métamorphoses et un enchaînement de merveilles qui tiennent tout esprit sain qui les observe dans une continuelle admiration ».
A vous, maintenant, de vous pencher sur cette plante d’apparence si modeste pour l’admirer, la déguster ou les deux. Je vous invite aussi à aller voir dans la rubrique « Plaisirs culinaires » quelques idées pour l’accomoder.
Pierrette